Ex-ministre fédérale de l’Energie, Marie-Christine Marghem (MCC/MR) accuse l’actuelle titulaire du dossier : Tinne Van der Straeten (Groen !) ment en affirmant que la capacité de production du parc éolien off-shore allait quadrupler et que les réacteurs nucléaires ne pouvaient pas être prolongés à cause des fissures mises au jour dans les cuves.
« Ce ne sont pas des fissures, mais des inclusions à l’hydrogène présentes bien avant la mise en service des réacteurs nucléaires et l’AFCN a démontré, depuis 2012, qu’elles n’ont pas bougé depuis lors », riposte Marie-Christine Marghem, désormais députée fédérale.
Elle soutient par ailleurs que la capacité de production des éoliennes en haute mer n’atteindra, au maximum, que 6 GW en 2032 et non 9,2 GW comme l’affirme la ministre écologiste flamande. Elle n’attend pas de décisions concrètes du Comité de concertation convoqué par le Premier ministre, Alexander De Croo (Open VLD), le mercredi 31 août. « Sur la question énergétique, le Gouvernement fédéral a échoué et aujourd’hui, il est obligé de bouger sous la pression des partis politiques du nord du pays. La sortie du Premier ministre prédisant des hivers difficiles pour les 5-10 hivers prochains est scandaleuse, on ne dit pas ça quand on est Premier ministre », dit-elle.
Déjà présent sur la table du Gouvernement fédéral avant les vacances, le dossier de la flambée des prix de l’énergie qui plombe le quotidien des ménages belges confrontés à la hausse des factures revient au-devant de la scène en cette rentrée 2022. Il faut dire la situation des ménages ne s’est pas améliorée entre-temps, elle a plutôt empiré et les prévisions sont plutôt alarmantes. […]
Elle rappelle au passage que l’AFCN a estimé la durée de vie des réacteurs à 47 ans et qu’il y a des solutions techniques pour porter cette échéance à 50 ans. « L’Agence a proposé ces solutions à Engie, mais l’exploitant des réacteurs nucléaires les a refusées. Donc, à minima, ces infrastructures peuvent fonctionner pendant 47 ans, mais la loi a limité leur durée de vie à 40 ans, ce qui veut dire que ces cuves atteignent les 40 ans respectivement en 2022 pour Doel 3 et 2023 pour Tihange 2. Or, si on s’en tient aux 47 ans, elles peuvent fonctionner jusqu’en 2029 et 2030. Tous les autres réacteurs pourraient, eux, tourner jusqu’à l’âge de 60 ans. Ils vont tous atteindre l’âge de 40 ans pour certains et de 50 ans pour d’autres qui ont déjà été prolongées comme Tihange 1, Doel 1 et Doel 2, qui pourraient être prolongés encore 10 ans. D3 et T2 pourraient, quant à eux, être prolongés de 20 ans. C’est ça c’est la vérité. Tout le reste, c’est du mensonge. C’est écrit dans les documents de l’AFCN », dit l’ancienne ministre de l’Energie.
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Abroger la loi de 2003 qui impose des études transfrontalières
Elle défait l’argumentaire de la ministre écologiste flamande sur un autre aspect du dossier. Il s’agit des règles de sécurité internationales, Wenra. « C’est un arrêté royal qui a rendu ces normes Wenra obligatoires, c’est-à-dire que Doel 1, Doel 2 et Tihange 1 doivent pouvoir résister à une chute d’avion. La ministre Van der Straeten affirme qu’il est impossible de prolonger ces réacteurs pour des raisons internationales. Or, c’est faux, car elle oublie sciemment de préciser que ces normes n’imposent pas le respect de ces normes pour justifier l’exploitation des réacteurs nucléaires. Engie ne comprend pas cette obligation, car elles ne sont pas obligatoires en France. C’est après Fukushima que ces normes ont été rendues obligatoires en Belgique et nous sommes le seul pays au monde à imposer l’application de toutes les normes pour des événements externes qui ne se produiront jamais », détaille Marie-Christine Marghem. En ce qui concerne l’approvisionnement en combustible dont les réacteurs ont besoin pour fonctionner (uranium), elle précise qu’il est possible de se les procurer dans les délais, notamment chez Orano (France). […]
Sur base d’un document d’Elia, le gestionnaire du réseau de transport d’électricité à haute tension, la présidente du MCC démonte aussi l’affirmation de la ministre de l’Energie sur les prévisions d’augmentation de la production d’électricité par les éoliennes en mer. « La capacité de production actuelle des éoliennes off-shore est de 2,3 GW, si on suit la ministre écologiste dans ses prévisions, on doit arriver à 9,2 GW. Or, dans les scénarios les plus optimistes pour 2032, on arrive à 6 GW d’après un document d’Elia. Le parc actuel d’éoliennes en mer (2,3 GW) produit la même chose en un an qu’un réacteur comme Tihange. On ne pourra jamais multiplier les projets pour arriver à la capacité de trois réacteurs nucléaires. Or, on sait qu’il manque 4 GW et que maintenant avec les problèmes français et les problèmes partout ailleurs, il faudrait 6 GW, donc c’est tout le parc nucléaire qui doit être prolongé. Et pour accélérer le tempo, il faut abroger la loi de 2003 qui impose notamment les études transfrontalières pour revenir aux arrêtés d’autorisation illimitée d’exploitation des centrales et faire des LTO (grosse maintenance) tous les 10 ans, c’est tout », rétorque Marie-Christine Marghem.
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Que propose-t-elle comme solutions alternatives ?
« La Belgique doit prendre des résolutions demandant aux producteurs de produire au maximum parce qu’on en a besoin. Mais elle doit aussi leur imposer de vendre leur production à un prix qui leur garantit une marge bénéficiaire normale. Et tout ce qui est au-dessus de cette marge, l’Etat doit le ponctionner pour soulager les factures des ménages. Il faut adopter la même démarche qu’en Espagne et au Portugal où les producteurs sont obligés de ne vendre qu’à un prix X.
Ça fait des mois que le Gouvernement fédéral aurait dû négocier avec la Commission européenne à ce sujet et obtenir son aval. Au lieu de ça, il a pris du retard avec une ministre écologiste qui fait le calcul qu’une énergie chère obligera les citoyens à consommer moins et d’ainsi arriver à la sobriété énergétique….. »
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Extrait de l’interview de Marie Christine Marghem sur Lpost